Le Groupe des Anciens Députés était représenté par les membres du Bureau aux vœux aux corps constitués de Madame Yaël Braun-Pivet, Présidente de l’Assemblée nationale – Mardi 17 janvier 2023.
Retrouvez ci-dessous l’allocution de la Présidente de l’Assemblée nationale
Madame la Première ministre,
Monsieur le Président du Sénat,
Mesdames et messieurs les membres du Gouvernement,
Mesdames et messieurs les sénateurs,
Mesdames et messieurs les députés, mes chers collègues,
Monsieur le Vice-Président du Conseil d’État,
Monsieur le Président du Conseil économique,
social et environnemental,
Madame la Défenseure des droits,
Monsieur le Délégué national de l’Ordre de la Libération,
Monsieur le Préfet de police,
Mesdames et messieurs les officiers,
Mesdames et messieurs les ambassadeurs,
Mesdames, messieurs, en vos grades et qualités
Les vœux aux corps constitués font partie des traditions de notre pays, mais cette tradition n’a pas toujours été respectée.
Elle fut même rejetée au plus fort de la Révolution française. Et plus récemment, la crise sanitaire nous a imposé des règles de distanciation incompatibles avec de telles cérémonies.
Nous revoici ! Ou plutôt, nous voici… Car cette Assemblée au nom de laquelle je suis heureuse et fière de vous accueillir aujourd’hui, l’Assemblée de cette XVIe législature qui ne fait que commencer, ne ressemble pas à celle qui a pu vous recevoir jadis.
Ce visage nouveau, c’est celui que nous donne cette configuration politique inédite dont il est tant question, la fameuse majorité relative issue des dernières élections législatives. Cette majorité relative qui nous rend un peu turbulents sans doute, qui enrichit chaque jour
ce droit ô combien vivant qu’est le droit parlementaire, constitué de règles écrites mais aussi de « précédents »…
Et nous créons beaucoup de précédents depuis le mois de juin !
J’en connais les difficultés, mais ces nouveaux équilibres, ce dialogue obligé, ce peut être une chance pour la France, si nous savons nous en saisir, nous écouter, nous rapprocher… nous respecter les uns les autres.
Ce visage nouveau tient aussi à d’autres raisons. Récemment, une lycéenne m’a demandé pourquoi il avait fallu
attendre 2022 pour qu’une femme préside l’Assemblée nationale.
Il est vrai que le chemin a été long. Mais il s’est passé quelque chose
et je vois d’autres visages ici – madame la Première Ministre, madame la Première Questeure, mesdames les vice-présidentes, mesdames les présidentes de groupe et de commission – qui ne pourront que m’approuver. Ce qui importe, c’est le cap : c’est le bon, celle dont notre pays a besoin.
Cette assemblée est au travail. Et bien sûr, mon premier vœu est qu’elle le reste, tout au long de l’année 2023.
Depuis juin 2022, les députés ont adopté de nombreux textes. Et pas n’importe lesquels. Nous avons protégé le pouvoir d’achat des Français, dans la crise que nous traversons. Nous avons augmenté les moyens des forces de l’ordre pour mieux garantir la protection
de nos concitoyens. Nous avons commencé un travail ambitieux en faveur des énergies renouvelables. Autant de priorités qui témoignent d’une volonté politique. Et l’année qui s’ouvre est porteuse d’autres réformes, nombreuses, dont notre pays a besoin.
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Comment ne pas parler d’abord de la réforme des retraites ?
Nous l’examinerons bientôt et je remercie Mme la Première Ministre d’avoir fait précéder nos travaux d’une large concertation sociale et politique, comme je l’avais souhaité à l’automne dernier. Il en résulte une réforme de responsabilité et de justice, visant à préserver notre modèle social fondé sur la solidarité entre les générations. Elle devra renforcer les droits des retraités les plus fragiles, ceux dont les carrières sont les plus longues ou les métiers les plus pénibles. Ce sont là des sujets majeurs, qui définissent les contours de la société dans laquelle nous voulons vivre. C’est à l’Assemblée nationale qu’ils doivent être débattus. Et nous avons, collectivement, la responsabilité de faire vivre ce débat, jusqu’au bout.
J’y veillerai, dans le respect des opinions, dans le respect des différences, et je compte sur chaque représentant de la Nation pour se montrer à la hauteur du mandat exigeant que les Français nous ont confié.
Des lois de programmation pour la justice et nos forces armées au projet de loi sur le nucléaire en passant par celui sur l’asile et l’immigration : le programme s’annonce chargé, ambitieux. Et nous sommes prêts.
Il est un autre chantier, dont chacun sait qu’il me tient à cœur : la fin de vie. Je crois, profondément, que nous devons accorder ce droit, cette liberté, à nos concitoyens. Et nous devrons, pour y parvenir, respecter les convictions de chacun. Sur un tel sujet, un débat apaisé constitue une nécessité absolue. Et si la vie n’est jamais aussi belle que lorsque l’on est libre, la mort aussi doit pouvoir être vécue en liberté. Ce débat se prépare au Conseil économique, social et environnemental, dont je salue le Président, cher Thierry, et il se poursuivra bientôt sur nos bancs, je le souhaite.
Lorsqu’il s’agit de libertés, il est plus fréquent pour nous, responsables politiques, d’appeler à les préserver plutôt que d’en créer. C’est donc une opportunité rare qui s’offrira aux parlementaires.
Rare, mais pas inédite : je pense à la liberté des femmes à disposer de leur corps, au droit à l’avortement, consacré par le Parlement il y plus de quarante ans. Ce droit, nous y tenons, et ce n’est pas un hasard si j’ai inauguré, le mois dernier, un buste de Simone Veil dans le jardin des Quatre-Colonnes.
Au moment où ce droit est menacé dans des pays où il semblait acquis, nous avons pris une décision importante, en votant en première lecture son inscription dans la Constitution, et ce, à une écrasante majorité. Nous devrons aller au bout de cette démarche – pour la France
et pour le monde. Car je le crois, quand il s’agit de la liberté des femmes, la France se doit de porter le flambeau. Au-delà de l’IVG, nous devons nous trouver partout aux côtés des femmes qui se battent pour leurs droits. Je pense en particulier à nos sœurs afghanes ou iraniennes, à qui je veux dire toute ma solidarité, tout mon soutien. Et je joins aujourd’hui ma voix à la leur : Femme, Vie, Liberté. On le voit, nos combats ici font écho à ce qui se passe ailleurs.
Dans un monde en proie aux crises et aux mutations, alors que la guerre a osé revenir sur le sol européen, l’Assemblée nationale a, là encore, un rôle à jouer. À travers ses groupes d’amitié, elle regarde au-delà des frontières et, dans le contexte que nous connaissons, je considère comme un devoir de dialoguer avec mes homologues étrangers, d’aller à leur rencontre et à celle de leurs concitoyens.
Depuis mon élection, je me suis ainsi rendue en Pologne, en Ukraine et, la semaine dernière encore, dans cette république amie d’Arménie, dont l’intégrité territoriale est menacée.
Bientôt, c’est mon homologue ukrainien, M. Ruslan Stefanchuk, Président de la Rada, qui viendra s’exprimer devant les députés, dans l’hémicycle. En outre, je me suis rendue à Berlin à deux reprises. Dimanche prochain, à la Sorbonne, en présence du Président
de la République et du chancelier allemand, j’aurai l’honneur d’ouvrir la célébration du 60e anniversaire du Traité de l’Élysée, aux côtés de mon homologue Mme Bärbel Bas, présidente du Bundestag. Puis, dans la même journée, nous publierons une déclaration commune ambitieuse. La jeunesse sera au cœur de cette journée de partage, c’est avec elle que se prépare l’avenir
À travers ces échanges, ce sont les valeurs de nos démocraties qui rayonnent à travers la planète entière. C’est encore plus indispensable aujourd’hui qu’hier car toutes les démocraties dans le monde sont en proie au doute, y compris la nôtre.