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Comment les questions du climat et des nouvelles technologies peuvent redessiner les relations internationales dans un monde en surchauffe !! par Guy MALHERBE

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En 1989, avec la chute du mur de Berlin, certains affirmaient que nous étions arrivés à la fin de l’histoire. En fait, l’histoire a décidé de se remettre en mouvement. L’histoire repart pour un tour : depuis une pandémie a mis le monde à l’arrêt, de nouveaux sujets et de nouvelles rivalités apparaissent, outre les conflits guerriers en Ukraine et entre Israël et le Hamas. La question climatique et les chocs technologiques font partie de ces nouveaux sujets conflictuels, ils créent de nouvelles tensions et rivalités qui vont modeler le futur monde. Quelle place et quel rôle l’Europe, et la France peuvent tenir.

Le climat et les nouvelles technologies sont des questions désormais incontournables dans les relations internationales et elles peuvent redessiner un nouveau contexte géopolitique.

Il était apparu que la question climatique était une affaire de techniques ou d’idéologie qui résoudraient toutes nos difficultés ou à peu près. Il suffisait de domestiquer nos problèmes par la technique, la volonté de comprendre, de maîtriser la connaissance, de fixer des normes par des réglementations. En fait, le climat n’est plus aujourd’hui une simple question de technique environnementale ; il est désormais incontournable dans les relations internationales et est devenu un enjeu diplomatique majeur traité par les Conférences des Parties(COP) qui se réunissent annuellement depuis 1995. Si la communauté internationale n’existe pas vraiment encore, elle pourrait naître avec l’écologie. (1) (2)


Autrement dit, il serait nécessaire que le système de relations internationales soit davantage tourné vers la coopération avec une vision cosmopolite du climat que vers les rivalités et les tensions motivées par des intérêts nationaux. Que peut faire un pays seul, aussi grand soit-il ? Rien.


C’est à dire que seule une action globale et concertée des pays, des pays riches en particulier, pourrait avoir une incidence sur le changement climatique. Si ce n’est pas le cas, ce sera le climat qui fera basculer la géopolitique mondiale avec le risque de voir les relations géopolitiques déjà très chaudes, en ce moment, se réchauffer encore un peu plus en créant de très fortes tensions et rivalités entre les pays du Nord et du Sud, riches et pauvres.


Les enjeux soulevés par le climat risquent de redessiner les relations internationales.
Gouverner le climat doit passer par des choix collectifs mondiaux déterminants sans quoi le monde va se déchirer.


Mais comment dans le contexte géopolitique actuel, cette communauté internationale du climat peut-elle naître, alors même que les nouvelles technologies créent des jeux de puissance parfois dangereux avec de nouvelles rivalités titanesques qui vont façonner le monde notamment dans les choix collectifs mondiaux à faire notamment pour gouverner le climat.


Aujourd’hui, les rivalités se cristallisent autour d’une compétition technologique à couteaux tirés entre la Chine et les États Unis. La compétition se fait à tous les niveaux, à coups de pression, de coercition de menaces, dans les domaines du climat, de l’intelligence artificielle civile, de la reconquête de l’espace, des chiffrements quantiques, des armes autonomes, des systèmes d’intelligence artificielle à usages militaires. En étau entre la Chine et les États Unis, l’Europe, comme la Corée du Sud et l’Inde aspirent à faire partie de la compétition et se positionnent pour jouer leur partition dans la recomposition du monde.


Le choc technologique est l’un des enjeux clés du XXIème siècle et les géants américains et chinois sont à l’avant-garde (2). Ils redéfinissent les enjeux de pouvoir et des puissances entre les nations dans tous les domaines, climat, guerre, information, sécurité, et tracent de nouvelles frontières de la souveraineté, comme Élon Musk qui est intervenu dans le conflit ukrainien par la couverture de la région de ses satellites. Au nom de quoi s’estime t’il acteur du conflit et impose t’il sa vision de la paix ? Éviter aux russes « un Pearl Harbour » en Crimée, dit-il !! Ces géants sont des agents perturbateurs de la démocratie. Mais, qui gouverne ces nouveaux acteurs privés de la prolifération technologique qui font des réseaux sociaux leur terrain de jeux pour façonner nos cerveaux et provoquer des batailles. Il est urgent de répondre à la question car ces géants américains et chinois sont ni plus ni moins en train de construire des puissance géopolitiques formelles, complémentaires des prérogatives actuelles des États. Ils constituent un continuum fonctionnel avec les États référents américains et chinois. Les États Unis et les GAFAM privés sont en interaction au moment où leurs activités sont mixtes militaires et civiles, et ou les mécanismes publics sont de contrôle inexistants. En Chine, ils sont sous contrôle.

Le rôle des acteurs technologiques est essentiel, ils détiennent, non seulement, la clé de la solution climatique, mais aussi, rien de moins, que celle du nouvel ordre mondial qui est en jeu avec la démocratie. Ils sont et font le monde neuf, là où les États sont devenus impuissants, sauf en Chine. Les super héros de la modernité sont aussi les hommes les plus riches et parmi les plus puissants d’un monde qu’ils façonnent : Elon Musk, Jeff Bezos, en passant par Sam Altman ou Mark Zuckerberg.


Que peuvent faire les européens qui ne disposent d’aucun de ses géants ? La France dispose d’un groupe avec la start-up MISTRAL AI, dont les fondateurs sont issus des rangs de Meta (maison mère de Facebook) et de Google. La start-up est championne européenne de l’IA, elle est susceptible de soutenir l’écosystème européen en retard par rapport aux États -Unis et de participer à la course contre la montre du côté européen.

Ou doivent-ils en conséquence « accepter un mode de vie dicté de l’extérieur « comme s’en est plaint le Président de la République dans son discours sur l’Europe à La Sorbonne ?

 
(1) Hubert Védrine : « le monde au défi » développe cette analyse de la géopolitique du climat.
(2) François Gemenne: « Géopolitique du climat : les relations internationales dans un monde en surchauffe »
(3) Asma Mhalla : «technopolitique : comment la technologie fait de nous des soldats »